Lettre fictive qu'une EVS n'écrira pas par peur de perdre son emploi. La précarité rend silencieuses les plus criantes injustices....
Monsieur L' Inspecteur d'Académie
Je suis emploi de vie scolaire. Je m'occupe d'un enfant dyspraxique quatre heures par jour. Je suis là pour deux ans et il y a toutes les chances pour que je suive cet enfant durant cette période. J'étais secrétaire et le mot même de dyspraxie m'était inconnu. J'ai la volonté de bien faire mon travail. Alors, pour cela, j'ai lu sur internet des informations concernant la dyspraxie. L'enseignante, qui n'a pas non plus de formation sur ce handicap, me donne des conseils et guide mes actions. Mais agir sans connaître, sans savoir, sans comprendre, c'est souvent mal agir. L'enfant est très patient avec moi et me
pardonne toutes mes lacunes. De toute façon, il n'a pas le choix.
J'ai appris que les mercredis il y avait une formation pour les personnes qui s'occupaient d'enfants handicapés. D'autres personnes, s'occupant comme moi d'élèves handicapés y vont et me disent que c'est souvent intéressant. C'est un lieu de rencontres et d'échanges sur les pratiques professionnelles.
Je me suis rendue à une de ces formations. J'ai fait garder mes deux enfants et parcouru 60 km pour me rendre à Auch. J'ai pris sur mon temps libre. Je ne travaille pas le mercredi. J'y ai rencontré d'autres personnes qui s'occupent aussi d'enfants handicapés.
Elles m'ont dit que la formation faisait partie de leur temps de travail et que leurs frais de transport étaient remboursés par l'inspection académique. Votre administration m'a expliqué que les EVS n'avaient pas droit à ce remboursement, que la formation ne s'adressait pas à elles, qu'elles pouvaient y venir mais uniquement sur leur temps libre et à leurs frais.
Pourquoi cette différence ? L'enfant dont je m'occupe n'a-t-il pas le droit à quelqu'un de formé ? Y a-t-il une hiérarchie entre les enfants handicapés ? Et si oui, sur quels critères attribuez-vous les gens formés à certains enfants et pas à d’autres ? Je croyais que l'égalité faisait partie des valeurs de notre république et donc des valeurs de l'éducation nationale. Vous, vous créez des inégalités même parmi les enfants handicapés.
Je touche 600 euros par mois et vous me demandez de payer pour aller me former.
Je n'ai droit ni à un salaire décent, ni à une formation. J'ai juste droit à la précarité et au silence. Tout comme cet élève handicapé qui à droit à une présence plutôt qu'une aide. Tout cela pour économiser une soixantaine d'euros par an et par EVS !!! .
Je vous présente, Monsieur l'inspecteur d'Académie , l'expression de mes
respectueuses salutations, et j'aurais aimé que ce respect soit réciproque.